COLLECTIF_FACT, artistes : « Transfert »
mercredi 28 mars 2007 — Conférence-projection

 

 

Newsletter n°9
mars 2007



Observatoire des nouveaux médias : Cycle de conférences organisé par l’École nationale supérieure des arts décoratifs (Atelier de recherches interactives) et l’Université Paris 8 (Programme de recherche Ciren et Master Art contemporain et nouveaux médias).


18 heures 30, Amphi Bachelier
Ensad 31 rue d’Ulm 75005 Pari
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collectif_fact, Ce qui arrive 21, photographie numérique, 30x30cm, 2005

« La ville est un espace complexe. Tellement complexe même, que d’en énoncer les parties reviendrait à décrire l’ensemble des activités humaines. La multiplication des signes et des activités, leur entrelacement, constitue de véritables nœuds dont les parties sont inextricables.

C’est pourtant ce que fait le collectif_fact depuis plusieurs années. L’architecture, l’urbanisme, les véhicules, la signalisation, la publicité, les utilisateurs, sont extraits, découpés, décomposés pour être recombinés et reconstruits.

Dans un de leurs premiers projets, ces jeunes artistes, nés à Neuchâtel et travaillant à Genève, ont réalisé une série de photographies et une vidéo. Datatown (2002), qui a été faite alors qu’ils n’étaient encore qu’étudiants à l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Genève, donne à voir la signalétique urbaine, hors de tout autre chose. Le reste n’apparaissant que par défaut, par son absence. Le noir remplace tout ce qui n’est pas signe, panneau, publicité, passage piéton, feu rouge, enseigne lumineuse, horloge, plaques d’immatriculation. Les passants, les voitures, les bâtiments, ne sont que du même noir que tout ce qui n’est pas signe, donnant l’impression de vues nocturnes. Mais ce qui frappe particulièrement, c’est que les signes suffisent à permettre une lecture urbanistique de la ville qu’ils parcourent. Les espaces, la vie, le trafic sont présents tout en étant absents. Une ville et ses habitants se réduiraient-ils à être de simples ombres, ou des supports publicitaires et non plus ceux qui créent la vie qu’ils habitent?

La plupart des projets du collectif_fact agissent par prélèvements, par extrusions. A partir de photos, de vidéos ou de fichiers numériques, des éléments sont sélectionnés et isolés dans un premier temps, puis replacés dans leur contexte original, voir dans d’autres situations. L’opération à néanmoins laissé des séquelles. A dessein, le collage est visible et les couches révèlent des rapports inattendus. La spatialité change, les volumes deviennent des aplats ou des traits, l’espace se déconstruit et se temporalise. Chaque projet explore des relations nouvelles et dévoile d’autres enjeux, ceux des sociétés que les humains habitent et génèrent.

Avec Circus (2004) une installation vidéo projetée dans l’angle d’une pièce, on pourrait croire à une simple déconstruction d’images. Une place a été photographiée en détail. Des bâtiments aux taches sur le sol, en passant par les voitures et les poubelles, une quantité innombrable de fragments ont été enregistrés, pour être collés par la suite. Sans relâche la superposition de plans, de couches d’images, s’assemblent et se séparent, créant l’illusion d’un espace décomposé, alors qu’il n’a pas existé en intégralité. La ville apparaît comme un collage d’objets étrangers les uns aux autres et rassemblés par force, et qui évoque davantage une décharge publique ou un amoncellement de résidus, qu’une planification harmonieuse pour le bien commun.


collectif_fact, Circus, screen shot, installation vidéo, 5'23'', en boucle;
son: Jean-Jacques Duclaux, 2004

Les translations, que le trio opère, apparaissent à toutes les étapes de la production. Leas outils numériques qu’ils utilisent, sont intégrés à la logique même du processus créatif de leurs installations. Progressivement, les projets vont se développer à partir de bases de données d’images, pour être composées comme de la musique électronique, par échantillonnage. Les éléments et les objets, les personnages et les environnements trouvent leur origine dans des fichiers réappropriés et réarrangés.

Avec les installations comme habitA (2003), plattform (2004) et ce qui arrive (2005), les fichiers numériques servent à constituer des éléments du décor ou les figurants des scènes. L’agencement de chaque partie se fait selon des schémas d’actions probables, ou de situations relationnelles standardisées.


collectif_fact, Ce qui arrive 2, photographie numérique (détail), 30x100 cm, 2005

Les personnages sont animés d’activités vaines et futiles, l’environnement est neutralisé par les clichés qu’il véhicule. Dans habitA, l’idéal de vie que représente la villa et la zone résidentielle, est débitée à la tronçonneuse numérique. Les personnages qui jouent au ballon ou étendent le linge sont rendus équivalents à une tondeuse à gazon ; que peut-on faire d’autre dans des jardins de 100m2, si ce n’est répondre aux clichés de la vie. Ce qui arrive est la transposition d’habitA dans un environnement administratif. En effet rien de plus semblable que les bureaux et les couloirs d’entreprises. Non seulement l’architecture et le mobilier sont appliqués selon des standards de management, mais avec l’avènement de l’informatique, leur uniformisation touche tous les systèmes de mise en forme : production, design, imagerie et organisation.

L’ère numérique est celle des numéros et de l’interchangeable. La chose remplacée par l’image, l’être remplacé par l’idée, la réalité remplacée par la médiaréalité. Avec distance, collectif_fact évoque un sentiment général et inexorable. Ces artistes transmettent l’envie d’échapper au système d’enfermement consentant, à l’avilissement des fourmis productives.

Dans leur travail, la numérisation des systèmes de production est appliquée dans sa pure logique rationnelle: copier, déplacer, recomposer, coller, médiatiser, exister. Exister ? »

Simon Lamunière



Biographies

Nés à Neuchâtel, Claude Piguet (1977), Annelore Schneider (1979), Swann Thommen (1979), constituent le trio d’artistes du collectif_fact. Diplômés de l’École supérieure des beaux-arts de Genève — et pour Annelore du post-diplôme de l’ARI à l’Ensad et d’un DEA à l’Université Paris 8 (2003) —, ils vivent et travaillent à Genève où ils sont représentés par la Galerie Edward Mitterand. Ils ont participé à de nombreuses expositions dans le monde. Ils sont en résidence à la Cité des Arts à Paris en 2007 et participent à La Belle Voisine, série d’expositions, en France, de la création contemporaine suisse (12 janvier - 31 mars 2007).










Les conférences Observatoire des nouveaux médias ont lieu tous les 15 jours, Amphi Bachelier, Ensad, 31 rue d’Ulm, Paris 5e.
Prochaines conférences : 25 avril 2007 (Élie During/Laurent Jeanpierre), 9 mai 2007 (Ultralab).

Pour recevoir la newsletter, envoyez votre adresse à ciren@ciren.org

Conseil de l’ODNM : Jean-Louis Boissier (Paris 8/Ensad), Samuel Bianchini (Université de Valenciennes), Martine Bour (Ciren/Citu/Paris 8), Jean-François Depelsenaire (Ensad), Pierre Hénon (Ensad), Liliane Terrier (Paris 8), Nicolas Thély (Paris 1), Gwenola Wagon (Paris 8)

Renseignements
http://www.ciren.org
http://www.ensad.fr
http://www.perso.ensad.fr/ari
http://www.arpla.univ-paris8.fr/~canal10


L’Atelier de recherches interactives (Ari) est un post-diplôme de l’École nationale supérieure des arts décoratifs. http://www.ensad.fr, http://www.perso.ensad.fr/ari

Le Centre interdisciplinaire de recherche sur l’esthétique du numérique (Ciren) est un programme de recherche de l’Université Paris 8 rattaché à l’équipe d’accueil  Arts des images et art contemporain, bénéficiant du soutien du Ministère de la culture (Mission recherche et technologie) et du Conseil régional d’Ile de France. http://www.ciren.org/

Art contemporain et nouveaux médias est un master de recherche de la discipline Arts plastiques de l’Université Paris 8. Les conférences Observatoire des nouveaux médias participent au cycle Moments d’art contemporain de ce master. http://www.arpla.univ-paris8.fr/~canal10